Du photojournalisme pertinent et émouvant
Le week-end dernier, l’équipe de Mademoiselle Rouge, toujours dans son insatiable quête culturelle, s’est rendue à la 10e édition de l’exposition World Press Photo 2015, célébrant du même coup le 60e anniversaire de la fondation du World Press Photo d’Amsterdam. Cette organisation totalement indépendante s’engage à développer des normes élevées en photojournalisme et documentaire dans le monde entier. L’exposition visite une centaine de villes réparties dans quarante-cinq pays… et Montréal est l’une des cités prisées par l’institution. Au marché Bonsecours, sont donc rassemblées 150 photos, dans 9 catégories, prises par 53 photographes de 25 pays.
Toutes catégories confondues, du sujet très difficile au plus accessible, la qualité des images est impeccable. Parmi les moments forts de cet évènement, on a noté le 1er prix dans la catégorie «Projets à long terme» : Amour familial, 1993-2014. Pendant 21 ans, le photographe Darcy Padilla a immortalisé l’Américaine Julie Baird et l’histoire complexe de sa famille vivant dans la pauvreté, le sida, les drogues, les pertes, les retrouvailles, les naissances, etc. La vraie vie dans ce qu’elle a de plus dur. Franchement émouvant.
Vous ne pourrez demeurer insensible face à la photo de l’année signée Mads Nissen qui pérennise ce magnifique moment d’intimité entre deux homosexuels russes dans un appartement de Saint-Pétersbourg. Placée dans le contexte sociopolitique de la Russie, cette photo prend vraiment tout son sens.
Parallèlement à cette revue photographique, on retrouve trois autres expositions : Deadline de Will Stacey, Oxfam-Québec, sur les inégalités sociales et économiques à travers le monde et Wapikoni, sur les communautés autochtones d’ici et d’ailleurs. Impossible de ne pas être remué à la vue de ces clichés qui mettent en lumière la détresse dans laquelle vit une grande partie de l’humanité et qui nous font également réfléchir sur la lente (mais assurée) décroissance que nous vivons depuis quelques années déjà. Deadline, qui présente le déclin du Philadelphia Inquirer (journal local philadelphien), dans la conjoncture de la chute de la presse écrite nord-américaine, vient nous faire réfléchir sur la trop grande place de l’information instantanée qui laisse souvent trop peu de place à l’analyse… tellement essentielle au bon fonctionnement d’une démocratie!
On ne saurait trop vous conseiller d’aller faire un tour au marché Bonsecours afin de vous brancher sur le pouls, parfois faiblard, du monde. On ressort de cette exposition plus que jamais convaincus par la pertinence du journalisme de terrain et on devient admiratif du courage de tous ces reporters et photojournalistes qui nous permettent d’être moins focalisé sur notre petit nombril, d’être plus ouvert sur le monde. L’exposition se déroule jusqu’au 27 septembre.
Pour plus d’informations : worldpressphotomontreal.ca
Image à la une : Tomas van Houtryve, Belgique, VII pour Harper’s Magazine (3e prix, catégorie «Sujets contemporains, Reportages»)