Contemplation et humour absurde
Au moment de l’année où la plupart des cinémas misent sur des comédies légères, on vous convie à une rencontre cinématographique pure, des plus singulières, avec un de nos réalisateurs chouchous : Roy Andersson. Plutôt méconnu de ce côté-ci de l’Atlantique, le suédois âgé de 72 ans a œuvré pendant près de 25 ans en création publicitaire avant d’obtenir l’approbation internationale. Fait à noter, Andersson a quand même créé deux films au début des années 70 (Une histoire d’amour suédoise et Gilliap) avant d’entamer son long détour en publicité, monde dans lequel il a dû puiser une partie de son inspiration pour la suite.
C’est en 2000 que le cinéaste revient en force avec le premier volet d’une trilogie : Chansons du deuxième étage. Gagnant du prix du jury au Festival de Cannes cette année-là, c’est grâce à ce premier chapitre qu’Andersson a fait véritablement tourner les têtes avec un style atypique, mais d’une indéniable beauté, mettant à l’avant-plan l’utilisation de cadrages fixes et de plans-séquences tournés en studio. De véritables tableaux animés ! Le deuxième volet, paru en 2007, titré Nous, les vivants, obtient lui aussi de nombreux prix dans une panoplie de festivals internationaux… et l’inimitable cinéaste est de retour avec la dernière partie de son projet : Un pigeon perché sur une branche philosophait sur l’existence.
De prime abord, les films d’Adersson peuvent être jugés froids, austères et parfois même lugubres, mais ils renferment un humour caustique, souvent décapant, portant sur la superficialité et le mal de vivre subtilement camouflé dans le monde dans lequel on vit. Plutôt que de raconter une histoire de manière traditionnelle, il nous propose une série de sketches, toujours avec cette poésie visuelle, un brin surréaliste, qui séduit toujours. Des plans fixes étudiés dans les moindres détails, des couleurs saturées et des personnages aux visages blanchâtres caractérisent le style extrêmement reconnaissable du réalisateur, qui dit avoir longtemps été jaloux de la peinture.
Évidemment, les films d’Andersson ne sont pas toujours faciles à décoder, mais pour le cinéphile curieux aimant être projeté hors de sa zone de confort, sa dernière œuvre atteint encore une fois la cible. Il faut simplement être prédisposé à regarder ce genre de cinéma, avoir l’esprit ouvert et se laisser transporter dans l’univers inspirant du cinéaste. Oui, les plans fixes sont longs, mais cet état contemplatif nous mène toujours quelque part : tantôt à un éclat de rire, tantôt à une réflexion philosophique.
Un pigeon perché sur une branche philosophait sur l’existence est présentement à l’affiche au cinéma Excentris et au cinéma du Parc, mais faites vite si vous ne voulez pas le manquer ! Un film à voir… un peu sombre, mais toujours teinté d’un humour décalé typiquement scandinave, typiquement Roy Andersson.
Photos : © Studio 24